L’Irlande et son statut particulier !
Au cours des dernières décennies, l'Irlande a servi d'abri fiscal à de nombreuses grandes entreprises technologiques, grâce à son faible taux d'imposition des sociétés. Les entreprises créent généralement des filiales irlandaises de leurs entreprises qui « monnayent » aux différentes antennes à travers le monde leur propriété intellectuelle, sur lesquelles la filiale paie des redevances.
Aujourd’hui c’est quelque 800 entreprises américaines qui sont implantées en Irlande, selon la Chambre de commerce américaine d'Irlande, employant environ 180 000 personnes. Apple a ouvert sa première usine en Irlande en 1980 et emploie aujourd'hui quelque 6 000 personnes sur son campus de la ville de Cork. Facebook a établi son siège international à Dublin en 2008, et Google son siège européen depuis 2003.
Une réforme difficile mais en bonne voie
C’est fait le gouvernement irlandais a accepté jeudi 7 octobre 2021 de relever son taux d’imposition sur les sociétés pour que Dublin rejoigne l’accord de réforme sur la fiscalité mondiale négocié sous l’égide de l’OCDE (l'Organisation de coopération et de développement économiques).
Dans les faits, l'Irlande accepte, au terme de longues tractations, de rejoindre un accord international négocié depuis quatre ans destiné à essayé de mettre fin au dumping et aux paradis fiscaux.
Concrètement, l’Irlande, qui est un pays qui affiche l’un des taux d’imposition sur les sociétés les plus faibles au monde (12.5%) a accepté de monter ce dernier à 15 % pour les sociétés réalisant plus de 750 millions d'euros de chiffre d'affaires.
En signant ce compromis, Dublin remet en cause son modèle économique de faible niveau d'imposition qui lui a permis d'attirer de nombreuses multinationales, notamment des géants technologiques ou pharmaceutiques, qui y ont enregistré leur siège européen. D'après un sondage commandé par « The Irish Times », une large partie des Irlandais était pourtant favorable à un maintien du taux d'impôt sur les sociétés à 12,5 %. Mais la pression internationale était trop forte.
Augmentation du taux d’imposition, oui mais…
Si le gouvernement irlandais a fait un pas en avant, les négociation n’en sont pour autant pas terminée.
Sur le papier Dublin a beaucoup à perdre. Mais en réalité, elle pourrait bien finir par s'en accommoder, selon certains experts.
Désormais l'essentiel des pourparlers ne se concentre plus tellement sur le niveau du taux d'imposition minimum effectif mais plutôt sur l'assiette fiscale sur laquelle il portera.
En effet, cette dernière affecte directement le modèle économique de certains pays qui souhaitent pouvoir, par une fiscalité avantageuse, continuer d'attirer des investissements sur leur territoire. C'est le cas de la Hongrie, de l'Estonie, de la Pologne et de… l'Irlande.
Une des solutions envisagées serait de défalquer de cette assiette fiscale 7,5 % du montant des actifs corporels et 10 % de la masse salariale pour calculer le montant d'impôt minimum. Avec pour but, d'ici à 10 ans d'arriver à un pourcentage qui ne serait plus que de 5 %.
Selon ce principe, l'accord qui se profile apporte de la « certitude » et permet à Dublin de rester « une destination attractive » pour les entreprises.
Au total, 136 pays se sont accordés pour imposer une taxation minimale à 15 % sur les multinationales après les ralliements de l'Irlande, l'Estonie et de la Hongrie. Cependant cet accord ne deviendra réalité qu’en 2023 au plus tôt.
A l'heure où les pays cherchent des fonds pour redresser leurs finances publiques mises à mal par la pandémie, cette réforme entend lutter contre l'évitement fiscal de multinationales, en grande partie américaines, qui s'enregistrent dans les pays aux plus faibles taux de taxation.